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    Chambres à gaz d’Auschwitz-Birkenau : abris antiaériens

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    Comment savons-nous que les crématoriums/chambres à gaz d’Auschwitz-Birkenau n’étaient pas des abris antiaériens pour les gardes allemands ?

    Les négationnistes de la Shoah affirment que :

    Les crématoriums/chambres à gaz d’Auschwitz-Birkenau étaient en fait des abris antiaériens. Ils étaient équipés de portes étanches au gaz pour protéger des gaz toxiques les personnes à l’intérieur.

    Plusieurs négationnistes de la Shoah ont fait la renommée de ces affirmations. En 1997, Arthur Butz, professeur de génie électrique à l’Université Northwestern et négationniste de la Shoah, affirma que les crématoriums/chambre à gaz 2 et 3 de Birkenau étaient « idéaux pour être convertis en abris antiaériens […] Il n’y avait pas de meilleur choix à Auschwitz ».[1] Un autre, Samuel Crowell (un pseudonyme), affirme que les Allemands étaient très anxieux au sujet de la guerre au gaz et cette crainte se reflétait dans leurs conceptions d’abris antiaériens, qui « devaient être protégés à la fois des bombes et des gaz toxiques ». S. Crowell rejette l’existence de volets étanches au gaz, de portes étanches au gaz avec judas, et de détecteurs de gaz, revendiquant simplement qu’ils étaient « bénins », « sans aucune intention criminelle ».[2]

    Pour expliquer pourquoi les autorités d’Auschwitz-Birkenau ont commandé à des fins « bénignes » des portes étanches au gaz et des détecteurs de gaz (entre fin 1942 et début 1943), David Irving, que la Haute Cour de justice de Londres a reconnu coupable en 2000 de négationnisme de la Shoah, de racisme et d’antisémitisme, a déclaré en 2000 lors de son procès pour diffamation à Londres que : « Il y a beaucoup de dossiers relatifs à des plans d’abris antiaériens, d’estimations et de preuves de la construction d’abris de bombes, et ainsi de suite. L’idée a été très en vogue, si je puis dire, dès août 1942 ».[3]

    Les faits sont les suivants :

    Les nazis utilisèrent la chambre du crématorium 1 du camp principal (Auschwitz I) comme chambre à gaz pour une partie de l’année 1942. En novembre 1944, elle devint la seule chambre à gaz transformée par les nazis en un abri antiaérien. Rien n’indique que les crématoriums et chambres à gaz du camp de Birkenau eussent été utilisés comme abris antiaériens ; ils étaient trop éloignés et complètement inadaptés à cette fin. Au lieu de cela, l’administration du camp installa de plus petits abris autour du périmètre de Birkenau. La question des portes étanches au gaz n’est que tergiversation, car les nazis avaient commandé ces portes 22 mois avant même que l’utilisation d’abris antiaériens ne soit considérée.

    Les raids aériens alliés dans la région d’Auschwitz-Birkenau :

    Des raids aériens alliés eurent lieu dans la région d’Auschwitz-Birkenau à la fin de la guerre. En août 1944, des avions alliés commencèrent à apparaître dans le ciel au-dessus d’Auschwitz-Birkenau. Les 20 août, 13 septembre, 18 décembre et 26 décembre 1944, les Alliés lancèrent des raids aériens sur l’usine de caoutchouc synthétique de Buna et sur les complexes industriels I.G. Farben. Ces énormes usines étaient des sous-camps d’Auschwitz-Birkenau, d’où ils obtenaient leur main-d’œuvre d’esclaves.

    En se dirigeant vers Buna et I.G. Farben, les Alliés prirent des photographies de reconnaissance alors qu’ils survolaient le camp principal et Birkenau. Dans la descente du 13 septembre 1944, une erreur de ciblage a causé la chute de bombes dans la zone du camp d’Auschwitz-Birkenau, tuant 15 SS et 40 détenus dans le camp principal ainsi que 30 ouvriers civils à Birkenau.

    Les abris antiaériens d’Auschwitz-Birkenau :

    Ce n’est qu’à la fin de 1943 que le Bureau central de la construction d’Auschwitz-Birkenau, sur ordre de Berlin, commença à construire des abris antiaériens dans le camp principal et à Birkenau. À Birkenau, ils optèrent pour la construction d’abris conçus pour un ou deux hommes. Ils furent placés à intervalles réguliers autour du périmètre du camp. Ces abris individuels plus petits avaient un avantage : ils étaient à proximité et étaient ouverts dans la direction du camp de prisonniers de sorte que les gardes SS pouvaient continuer à couvrir le périmètre tout en s’y abritant.[4]

    À Auschwitz I (le camp principal), le crématorium/la chambre à gaz 1 était un choix évident pour devenir un abri antiaérien parce que les gardes SS pourraient rapidement s’y réfugier en cas d’attaque. Les trous dans le toit, à travers lesquels le Zyklon B était auparavant déversé, furent bouchés. Les plans de l’abri antiaérien datent de septembre 1944 et montrent qu’ils avaient construit des murs supplémentaires dans la chambre à gaz. La raison était de fournir un meilleur soutien pour le toit en béton et de minimiser les dommages si une bombe parvenait à le pénétrer. Il y avait déjà une porte étanche au gaz, et une porte supplémentaire fut ajoutée comme une sortie de secours. Aucune autre construction ne fut nécessaire.[5]

    Enfin, bien que le crématorium/la chambre à gaz 1 du camp principal ait été parfaitement adéquat pour être utilisé comme abri antiaérien, les quatre crématoriums/chambres à gaz de Birkenau étaient trop éloignés pour être utiles lors d’un raid aérien. Certains des SS auraient dû courir plus d’un kilomètre et demi pour y prendre refuge. Les gardes auraient également dû abandonner leurs postes.[6] C’est pourquoi les nazis convertirent 176 blocs de béton en abris individuels dispersés autour du périmètre.[7]

    Pourquoi les négationnistes de la Shoah disent-ils que les autorités d’Auschwitz-Birkenau avaient prévu de construire des abris antiaériens dès 1942 ?

    Il est important pour les négationnistes de la Shoah de prétendre que des abris antiaériens furent construits à Birkenau à la fin de 1942 et au début de 1943. En faisant cette affirmation, les preuves accablantes qui témoignent des tueries, comme les portes étanches au gaz, les volets et les détecteurs de gaz, peuvent être attribuées à l’utilisation innocente d’abris antiaériens. Une liste partielle de ces éléments comprend les éléments suivants :

    • Le 1er janvier 1943, trois portes étanches au gaz furent commandées pour le crématorium/la chambre à gaz 2.[12]
    • Le 26 février 1943, dix détecteurs de gaz furent commandés par télégramme à Topf & Sons.[13] Des détecteurs de gaz étaient nécessaires pour déterminer quand l’entrée dans les chambres à gaz pour retirer les corps serait sécurisée.
    • Le 31 mars 1943, une porte étanche au gaz fut commandée pour le crématorium/la chambre à gaz 3.[14]

    Les nazis commandèrent tous ces articles au début de l’année 1943 pour les chambres à gaz. Les autorités d’Auschwitz-Birkenau commencèrent à construire de véritables abris antiaériens en octobre/novembre 1944, quelque 22 mois plus tard. De même, les petits abris antiaériens faits pour un seul homme, dispersés autour du périmètre de Birkenau en 1943, n’avaient besoin d’aucune des fonctionnalités d’étanchéité au gaz.

    Ce que les documents primaires révèlent sur l’existence d’abris antiaériens à Auschwitz-Birkenau :

    D. Irving prétend que les dossiers du Bureau central de la construction à Auschwitz-Birkenau montrent que les Allemands pensaient prendre des précautions contre les raids aériens alliés dès le milieu de l’année 1942. D. Irving suggère qu’ils « avaient commencé à considérer la construction d’abris, de tranchées de protection contre les éclats de bombes, et d’autres mesures de précaution contre les raids aériens dans le camp ».[8] Peut-être, affirme-t-il, les autorités d’Auschwitz-Birkenau étaient-elles « inquiètes » de la possibilité de futurs raids aériens en 1942.

    Cependant, les propres dossiers des nazis montrent qu’ils n’ont pas commencé à envisager sérieusement de construire des abris antiaériens jusqu’en octobre 1943. Ils ont seulement commencé à les construire en octobre/novembre 1944, après le raid aérien du 13 septembre. Selon Robert Jan van Pelt, qui a examiné les preuves documentaires nazies pour le procès en diffamation Irving-Lipstadt/Penguin à Londres, en 2000, « Aucun des documents […] ne mentionne un crématorium ou une morgue, ou un plan pour convertir une morgue ou un crématorium en un abri antiaérien […] En outre, aucun des documents […] ne mentionne une construction prévue ou exécutée d’un abri antiaérien dans l’un des camps d’Auschwitz avant novembre 1943 ».[9] La première mention de toute activité relative à la construction d’abris antiaériens est le mémorandum d’une réunion tenue le 9 novembre 1943, où fut tenue une simple discussion sur les préparatifs à prendre. Un mémo de cette réunion indiquait que seule la construction d’une tranchée de protection contre les éclats de bombes, pour une salle d’opération hospitalière, venait de commencer.[10] R. J. van Pelt conclut : « La seule question préoccupante à Auschwitz avant novembre 1943 était de permettre au camp d’adhérer aux règles de black-out et à l’instauration de mesures préventives, y compris l’installation et l’entretien d’extincteurs d’incendie dans divers bâtiments, et la création d’étangs pour servir de réserves d’eau en cas d’attaque avec des bombes incendiaires ».[11] Ainsi, la suggestion de D. Irving selon laquelle un sentiment d’urgence à l’égard des raids aériens alliés existait dès 1942 n’est pas étayée par les preuves.

    Aerial view of Auschwitz-Birkenau. By Ryszard Domasik (Photo by Ryszard Domasik.) [GFDL (http://www.gnu.org/copyleft/fdl.html) or CC-BY-SA-3.0 (http://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/)], via Wikimedia Commons.
    Vue aérienne d’Auschwitz. Photo par Ryszard Domasik. [GFDL ou CC-BY-SA-3.0], via Wikimedia Commons.

    Pourquoi les portes des crématoriums/chambres à gaz d’Auschwitz-Birkenau s’ouvrent-elles vers l’extérieur ?

    Lorsque les nazis conçurent les crématoriums/chambres à gaz 2 et 3, les portes s’ouvraient vers l’intérieur des salles de la morgue. Comme le montrent les plans existants, quand ils transformèrent les salles de morgues en des chambres à gaz, les portes furent repensées pour s’ouvrir vers l’extérieur de la salle.[15] Les portes furent refaites de cette façon parce que, autrement, les Sonderkommandos n’auraient pas pu ouvrir les portes et enlever les corps de leurs victimes. Les victimes qui mourraient contre la porte auraient bloqué l’ouverture des portes. En revanche, les portes des abris antiaériens étaient conçues pour s’ouvrir vers l’intérieur de la pièce. De sorte que s’il y avait des gravats entassés à l’extérieur de la porte, les gens à l’intérieur ne seraient pas piégés.

    Seul le crématorium/la chambre à gaz 1 du camp principal, qui fut utilisé comme chambre à gaz pendant une courte période entre fin 1941 et fin 1942, fut modifié pour devenir un abri antiaérien (en novembre 1944). Les preuves démontrent que les crématoriums/chambres à gaz 2 et 3 de Birkenau n’ont jamais été des abris antiaériens. Les portes étaient conçues pour s’ouvrir vers l’extérieur, et non vers l’intérieur, comme elles l’auraient été s’il s’était agi d’abris antiaériens. Des portes étanches au gaz et des détecteurs de gaz furent commandés pour les crématoriums/chambres à gaz 2 et 3 au début de l’année 1943. Ce n’est qu’en octobre/novembre 1944 — près de 22 mois après les commandes — que les autorités d’Auschwitz-Birkenau commencèrent véritablement à construire des abris antiaériens. Les allégations des négationnistes de la Shoah, selon lesquelles les bâtiments de la chambre à gaz étaient des abris antiaériens, ne sont pas étayées par les preuves. Robert Jan Van Pelt résume cela de la façon suivante : « Il n’y a pas une once de preuve à l’appui de ce que prétend Crowell quant à la conception de ces espaces, et encore moins quant à leur utilisation, comme abris antiaériens ».[16]

    NOTES

    [1] Arthur R. Butz, « Vergasungskeller » à l’adresse http://codoh.com/library/document/1026.

    [2] Samuel Crowell, « Wartime Germany’s Anti-Gas Air Raid Shelters: A Refutation of Pressac’s ‘Criminal Traces’ » à l’adresse www.ihr.org/jhr/v18/v18n4p-7_Crowell.html.

    [3] Transcription, jour 8, 11 janvier 2000, p. 101 à l’adresse https://www.hdot.org.

    [4] Une photographie de ces petits abris se trouve à l’adresse http://nizkor.org/ftp.cgi/camps/auschwitz/images/1998/Keren/air-shelter.jpg.

    [5] Robert Jan van Pelt, The Case for Auschwitz: Evidence from the Irving Trial (Indiana University Press, 2002), p. 316, voir les plans des lieux datés de septembre 1944.

    [6] Robert Jan van Pelt, The Case for Auschwitz: Evidence from the Irving Trial (Indiana University Press, 2002), p. 314.

    [7] Robert Jan van Pelt, The Case for Auschwitz: Evidence from the Irving Trial (Indiana University Press, 2002), p. 319.

    [8] Transcription, Jour 32, 15 mars 2000, p. 178 à l’adresse https://www.hdot.org. Voir également David Irving, « New Documents on Air Raid Shelters at Auschwitz Camp » à l’adresse www.fpp.co.uk/Auschwitz/docs/LSKeller/MoscowDocs.html (documents en allemand). Pour trouver des traductions anglaises de ces documents, accédez aux “Documents from Moscow Archives describe building of air-raid shelters at Auschwitz-Birkenau in 1943-44 » à l’adresse http://codoh.com/library/document/908.

    [9] Robert Jan van Pelt, The Case for Auschwitz: Evidence from the Irving Trial (Indiana University Press, 2002), pp. 326, 327.

    [10] Robert Jan van Pelt, The Case for Auschwitz: Evidence from the Irving Trial (Indiana University Press, 2002), p. 328.

    [11] Robert Jan van Pelt, The Case for Auschwitz: Evidence from the Irving Trial (Indiana University Press, 2002), p. 328.

    [12] Robert Jan van Pelt, The Case for Auschwitz: Evidence from the Irving Trial (Indiana University Press, 2002), pp. 314, 401.

    [13] Robert Jan van Pelt, The Case for Auschwitz: Evidence from the Irving Trial (Indiana University Press, 2002), pp. 311, 401.

    [14] Robert Jan van Pelt, The Case for Auschwitz: Evidence from the Irving Trial (Indiana University Press, 2002), pp. 314, 315.

    [15] Robert Jan van Pelt, The Case for Auschwitz: Evidence from the Irving Trial (Indiana University Press, 2002), p. 377.

    [16] Robert Jan van Pelt, The Case for Auschwitz: Evidence from the Irving Trial (Indiana University Press, 2002), p. 317.